Retraite : les libéraux ayant payé leurs cotisations en retard ne seront plus pénalisés

L’article R.643-10 du code de la Sécurité sociale est rigoureux vis-à-vis des professionnels libéraux affiliés à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) : s’ils ne s’acquittent pas de leurs cotisations de retraite de base dans un délai de 5 ans suivant leur date d’exigibilité, les périodes correspondantes ne sont pas prises en considération pour le calcul de la pension de retraite. Et ce, même si le professionnel libéral venait, passé ce délai, à régulariser sa situation.
 

Retraite : les libéraux ayant payé leurs cotisations en retard ne seront plus pénalisés
Publication : 17 octobre 2022 Lecture : 2 minutes

La Cour de cassation a récemment jugé cette disposition non-conforme au droit européen. Retour sur cet arrêt n°21-16.072 du 2 juin 2022 qui entend mettre fin à cette « atteinte excessive » au droit de propriété garanti par la Convention européenne des droits de l’homme. 
 

Absence de droit à la retraite pour l’assuré ayant payé ses cotisations trop tardivement

Un professionnel libéral affilié à la CNAVPL sollicite la liquidation de sa pension de vieillesse prenant effet au 1er juillet 2014. Il constate que la Caisse n’a pas pris en compte, pour le calcul de sa pension de retraite, les points correspondants aux cotisations acquittées tardivement (à savoir plus de 5 ans après leur date d’exigibilité) au titre des années 1982 à 1984, 1987, et 1990 à 1995. 

La Caisse avait en effet appliqué à la lettre la disposition du code de la Sécurité sociale selon laquelle « lorsque les cotisations arriérées n’ont pas été acquittées dans le délai de cinq ans suivant la date de leur exigibilité, les périodes correspondantes ne sont pas prises en considération pour le calcul de la pension de retraite ». 

L’assuré saisit alors d’un recours une juridiction de Sécurité sociale. Selon lui, le dispositif qui sanctionne le retard de paiement par une absence totale d’attribution de points au titre des dites cotisations constitue une ingérence au droit de propriété des assurés en ce qu’il porte une atteinte à la substance de leurs droits à pension.

Cet article ne ménage pas un juste équilibre entre les intérêts en présence, à savoir l’exigence de financement du régime de retraite d’une part, et le droit individuel à pension de retraite des cotisants d’autre part, ce qui constitue une atteinte au droit européen.

Pour la Cour d’appel, le délai de 5 ans laissé au cotisant pour régulariser ses cotisations – et ainsi préserver ses droits futurs – n’est pas d’une « rigueur excessive ». La disposition en cause n’est donc pas incompatible avec la protection du droit de propriété instituée par le droit européen. Le demandeur s’est alors pourvu en cassation.

Pour la Cour de cassation, la règle est contraire au droit européen

La Cour de cassation ne confirme pas l’arrêt de la Cour d’appel, et motive ainsi sa réponse : 
 « Le défaut de prise en compte des cotisations payées au-delà du délai de 5 ans suivant leur date d’exigibilité, mais avant la liquidation du droit à pension, porte une atteinte excessive au droit fondamental garanti en considération du but qu’il poursuit et ne ménage pas un juste équilibre entre les intérêts en présence ».

L’article R.643-10 du code la sécurité sociale n’est donc pas conforme à la CEDH, qui implique un rapport raisonnable de proportionnalité exprimant un juste équilibre entre les exigences de financement du régime de retraite et les droits individuels à pension des cotisants.

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