Abandon de poste assimilé à une démission : ce qui a changé depuis le 19 avril 2023

Depuis le 19 avril 2023, l’abandon de poste est assimilé à une présomption de démission : les salariés qui abandonnent leur poste de travail sans raison légitime ne pourront donc plus prétendre aux allocations chômage. 
Retour sur cette mesure, adoptée dans le cadre de l’examen de la loi « marché du travail », puis précisée par un décret et un questions-réponses du ministère du Travail, dont le contenu fait débat.

Abandon de poste assimilé à une démission : ce qui a changé depuis le 19 avril 2023

Abandon de poste : du licenciement à la présomption de démission 

Jusqu’alors, le salarié qui abandonnait volontairement son poste de travail sans justification ne pouvait pas être considéré comme démissionnaire. De fait, l’employeur n’avait d’autre choix que de le licencier pour faute, ce qui permettait au salarié de bénéficier de l’allocation de retour à l’emploi (ARE), versée par Pôle emploi.

Lors de l’examen de la loi « marché du travail », les députés ont - largement - adopté une mesure visant à encadrer cette pratique (219 voix pour, 68 contre). Elle assimile l’abandon de poste à une présomption de démission, engendrant une conséquence directe pour les salariés : ils ne pourront plus prétendre au versement des allocations chômage, sauf à ce que le caractère légitime de la démission soit reconnu par Pôle emploi.

Présomption de démission : la procédure obligatoirement appliquée en cas d’abandon de poste ?

Le questions-réponses publié par le ministère du Travail explique que l’employeur peut décider de ne pas mettre en demeure le salarié qui a abandonné volontairement son poste de travail. Dans ce cas de figure, le contrat du salarié est suspendu, mais non rompu, et la rémunération du salarié n’est pas due. 
Qu’en est-il maintenant de l’employeur qui souhaite se séparer de son salarié à la suite de l’abandon de poste ? Il doit déclencher la procédure de mise en demeure et de présomption de démission, indique l’administration. Le questions-réponses va même jusqu’à expliquer que l’employeur « n’a plus vocation à engager une procédure de licenciement pour faute ».

Cette phrase pose question : les dispositions légales et règlementaires encadrant la présomption de démission ne mentionnent pas que cette nouvelle procédure est exclusive du licenciement. Quant au questions-réponses de l’administration, il n’a pas de valeur juridique. 
Interrogé par de nombreux juristes, le ministère assume désormais l’exclusion totale du recours au licenciement disciplinaire en cas d’abandon de poste. Selon lui, l’employeur ne peut plus utiliser l’abandon de poste comme un fait motivant une faute grave ou lourde. 

Étape 1 : mise en demeure du salarié abandonnant son poste de travail 

L’employeur qui constate qu’un salarié a abandonné son poste de travail et qui souhaite mettre fin à sa relation de travail avec son salarié doit lui envoyer une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception, ou lui remettre la lettre en main propre contre décharge. 

La lettre doit obligatoirement : 

  • Indiquer le délai dans lequel le salarié doit reprendre son poste : à noter que ce délai ne peut être inférieur à 15 jours calendaires à compter de la présentation de la mise en demeure, c’est-à-dire week-end et jours fériés compris ;
  • Demander au salarié la raison de son absence ; 
  • Rappeler au salarié que, faute d’avoir repris son poste dans ce délai, il sera présumé démissionnaire. 

Elle peut aussi rappeler au salarié qu’étant considéré comme démissionnaire, il n’aura pas droit aux allocations chômage. 

Étape 2 : réponse du salarié  

Après réception de la mise en demeure, le salarié peut invoquer un motif légitime qui justifierait son absence. Le décret d’application fournit une liste, non limitative, des cas de figure dont il peut se prévaloir : 

  • Une raison médicale ; 
  • L’exercice du droit de retrait ; 
  • L’exercice du droit de grève ; 
  • Le refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à la règlementation ; 
  • La modification du contrat de travail à l’initiative de l’employeur. 

Lorsqu’un motif légitime est avancé par le salarié, la procédure permettant de présumer une démission ne doit pas être conduite à son terme. Dans le cas contraire, il est présumé démissionnaire. 
 

Étape 3 : présomption de démission 

Le salarié est présumé démissionnaire à la date ultime de reprise du travail fixée par l’employeur, lorsque le salarié : 

  • Ne répond pas à la mise en demeure ; 
  • Invoque un motif qui n’est pas considéré comme légitime ; 
  • Répond qu’il ne reprendra pas son travail dans l’entreprise.

À l’expiration de ce terme, les règles législatives, conventionnelles et jurisprudentielles relatives à la démission trouvent à s’appliquer.

Recours pour le salarié 

Le salarié qui souhaite contester la rupture de son contrat de travail sur le fondement de la présomption de démission peut saisir le conseil des prud’hommes. 
La loi précise que l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui se prononce sur la nature de la rupture et les conséquences associés. Il statut au fond dans un délai d’un mois à compter de sa saisine. 

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