Quelle protection pour le conjoint collaborateur ?

Quelle protection pour le conjoint collaborateur ?

C’est en 2005, dans le cadre de la loi en faveur des petites et moyennes entreprises, que pour la première fois les pouvoirs publics donnaient aux conjoints collaborateurs un véritable statut social : en contrepartie du versement de cotisations, ils acquièrent désormais des droits propres pour la retraite de base et complémentaire, l’invalidité et le décès, et des indemnités journalières.

Mais ces dernières années, le statut connaissait une érosion démographique(1), signe de son déclin progressif. 
Face à cette situation, le gouvernement décide alors de simplifier et moderniser le statut de conjoint collaborateur. Le Plan indépendants, présenté par le Président de la République en septembre 2021, prévoit ainsi plusieurs mesures visant à « mieux protéger le conjoint collaborateur » : l’ouverture du statut au concubin du chef d’entreprise, la limitation de l’exercice du statut à 5 ans, la simplification du calcul des cotisations sociales...

Vous souhaitez en savoir plus sur le sujet ? Découvrez également notre article qui traite du sujet : « travailleurs indépendants : quels sont les changements apportés par le « Plan Indépendants » ?

Retour sur les nouveautés issues du Plan indépendants, et focus sur la protection sociale du conjoint collaborateur des artisans et commerçants.  

Le choix du statut du conjoint 

Lorsque le concubin ou le conjoint marié/pacsé d’un chef d’entreprise exerce une activité professionnelle régulière dans son entreprise, le dirigeant doit déclarer son activité et opter – obligatoirement - pour l’un des trois statuts suivants, qui déterminera les droits et obligations du conjoint : 

  • Conjoint salarié 
  • Conjoint associé 
  • Conjoint collaborateur 

Bien que le choix d’un statut pour son conjoint soit obligatoire, le gouvernement estimait en 2019 qu’environ 1/3 d’entre eux n’étaient pas couverts par l’un des trois statuts. Et pour cause : le défaut de choix n’était assorti d’aucune sanction. Le législateur est venu modifier cette incohérence dans la loi Pacte, adoptée en mai 2019. Désormais, le statut de conjoint salarié, le plus protecteur, s’applique de plein droit en cas de manquement du chef d’entreprise. 
 

Questions
Je suis conjoint collaborateur. Puis-je bénéficier d’une rémunération ?

Non. Ce statut est strictement réservé aux conjoints qui ne perçoivent aucune rémunération au titre de leur activité. 
Tous les conjoints de chefs d’entreprise peuvent-ils opter pour le statut du conjoint collaborateur ?
Non. Le choix de ce statut n’est possible que pour les entreprises individuelles (EI), entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée (EURL), et sociétés à responsabilité limitée (SARL et SELARL) sous réserve que le chef d’entreprise soit gérant majoritaire.
Puis-je être conjoint collaborateur durant toute ma carrière ?
Depuis le 1er janvier 2022, le statut de conjoint collaborateur est limité à 5 ans au cours d’une carrière professionnelle. Un rapport(2) publié par l’Assemblée nationale estime que cette limitation dans le temps permettra notamment de limiter l’impact de ce statut faiblement protecteur sur les droits à la retraite du conjoint.

La protection sociale du conjoint collaborateur

Le conjoint collaborateur d’un artisan ou commerçant est affilié personnellement à la Sécurité sociale des indépendants. En contrepartie du versement de cotisations sociales à l’URSSAF, il acquiert des droits propres pour la retraite de base et complémentaire, la maladie-maternité, l’invalidité-décès, et la formation professionnelle continue. 

Maladie, maternité/paternité et adoption 

Maladie prestations en espèces : 
Après 1 an d’affiliation et en contrepartie d’une cotisation forfaitaire de 140 €, le conjoint a droit à des indemnités journalières forfaitaires en cas de maladie ou accident, de 22,54 €. 

Maternité, paternité et adoption : 
La conjointe collaboratrice enceinte a droit à : 

  • Une allocation forfaitaire de repos maternel, d’un montant de 3 428 €, versée en deux temps
  • Une indemnité forfaitaire de remplacement, égale au coût réel du remplacement, dans la limite d’un plafond de 57,25 € par jour. Elle est versée durant 112 jours maximum. 

Le conjoint collaborateur peut également, après la naissance de son enfant ou celui du chef d’entreprise, bénéficier d’un congé de paternité ou d’accueil de l’enfant durant 25 jours. L’indemnité forfaitaire de remplacement de 57,25 € par jour maximum est alors versée.
En cas d’adoption, les conjoints collaborateurs ont droit à : 

  • Une allocation forfaitaire de repos d’un montant de 1 714 € 
  • Une indemnité forfaitaire de remplacement, égale au coût réel du remplacement, dans la limite d’un plafond de 57,25 € par jour. Depuis le 1er janvier 2022, l’indemnisation est due durant 12 semaines, en lieu et place des 8 semaines qui s’appliquaient jusqu’alors.

Pour bénéficier de l’une de ces prestations, il est nécessaire que le chef d’entreprise justifie de 10 mois d’affiliation en tant que travailleur indépendant. 

Retraite et invalidité-décès 

En matière de retraite et d’invalidité-décès, le conjoint doit choisir l’assiette de calcul de la cotisation pour la retraite de base. L’assiette choisie s’applique également aux cotisations de retraite complémentaire et d’invalidité-décès. Le montant des prestations retraite et invalidité-décès sera déterminé en fonction de l’option retenue au titre des cotisations. 
En pratique, le dirigeant déclare son conjoint collaborateur auprès du centre de formalités des entreprises (CFE) et cotise au nom de ce dernier soit sur une base forfaitaire, soit sur un pourcentage de son revenu professionnel.

Les différentes options de cotisations pour le conjoint collaborateur 

Voir l'infographie

À l’heure où nous écrivons ces lignes, le conjoint a le choix entre cinq assiettes de cotisations. Deux de ces cinq options sont cependant vouées à disparaître : le Plan indépendants a prévu de ne conserver que les options les plus protectrices des droits du couple. Cette mesure nécessite un décret, non paru à ce jour, pour entrer en vigueur. Il est attendu courant 2022. 
Les trois options suivantes seront conservées : 

Option 1 : Une assiette égale à 1/3 du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), soit 13 712 € en 2022. Cette option sera conservée après la réforme, car elle est intéressante lorsque l’assiette égale à 50 % des revenus du chef d’entreprise est inférieure à ce montant.

Option 2 : Une assiette égale à 50 % du revenu du chef d’entreprise, sans partage d’assiette. Le chef d’entreprise cotise alors sur la base de l’intégralité de son revenu, tandis que le conjoint cotise sur la moitié du revenu réel du chef d’entreprise. 

Option 3 : Une assiette égale à 50 % du revenu du chef d’entreprise, avec partage d’assiette. Le conjoint collaborateur cotise alors sur la base de la moitié des revenus du chef d’entreprise, et ce dernier cotise sur l’autre moitié. Choisir cette option nécessite l’accord du chef d’entreprise car elle est susceptible d’entraîner une diminution de ses droits à retraite. 

À l’inverse, les options avec et sans partage de revenu basées sur la base du tiers du revenu du dirigeant seront supprimées. 

À noter qu’en cas de faibles revenus, le conjoint doit s’acquitter d’une cotisation minimale de 910 € pour avoir des droits à la retraite et à l’assurance invalidité/décès. 

Le saviez-vous ? 

Les conjoints collaborateurs des micro-entrepreneurs ne cotisent pas sur les mêmes bases que les conjoints collaborateurs des professionnels indépendants « classiques ». Eux aussi ont vu les modalités de calcul de leurs cotisations simplifiées en 2022 (voir infographie)

Droits à la retraite 

Les droits à la retraite de base et complémentaire sont calculés en fonction du revenu cotisé par le conjoint collaborateur.

Il est toutefois à noter que pour valider un trimestre de retraite, les travailleurs indépendants doivent cotiser sur un revenu minimum équivalent à 150 fois le SMIC horaire, soit 1 585,50 € en 2022. Ainsi, pour valider 4 trimestres au titre d’une année, le revenu cotisé doit être au moins égal à 600 SMIC horaire, soit 6 342 €. 

L’option 1 (1/3 du PASS) permet ainsi au conjoint collaborateur de valider avec certitude ses 4 trimestres. À l’inverse, pour les autres options, les 4 trimestres ne sont validés que lorsque le revenu du chef d’entreprise est suffisant. 

Droits aux prestations invalidité et décès 

Les modalités de calcul des prestations invalidité et décès du conjoint collaborateur sont identiques à celles versées au chef d’entreprise. Elles dépendent également du revenu cotisé, qui servira de base au calcul des prestations.

Invalidité : 

  • En cas d’invalidité totale et définitive, le conjoint perçoit une pension d’invalidité égale à 50 % du revenu cotisé. Elle est d’au maximum 20 568 €/an en 2022.
  • En cas d’invalidité partielle, sa pension d’invalidité est égale à 30 % du revenu cotisé. Elle est d’au maximum 20 568 €/an en 2022. 
  • Lorsque l’état de santé du conjoint collaborateur nécessite le recours à une tierce personne, la pension est majorée de 1 146,68/mois.

Exemple : Un chef d’entreprise a un revenu annuel moyen de 40 000 €. Il travaille avec son conjoint collaborateur, lequel a choisi l’option de cotisation n°2 (assiette égale à 50 % du revenu du chef d’entreprise, sans partage d’assiette). Le conjoint cotise ainsi sur la base de la moitié de 40 000 €, soit 20 000 €. En cas d’invalidité totale et définitive, sa pension d’invalidité sera calculée sur cette base, et sera ainsi égale à 10 000 €/an (50 % x 20 000 € = 10 000 €).

Décès : 
En cas de décès du conjoint collaborateur cotisant, le montant du capital décès servi aux ayants droit est égal à 20 % du PASS, soit 8 227,20 € en 2022. S’il était retraité, le capital décès ne sera que de 8 % du PASS, soit 3 290,88 €. 

Info-marché 
Les prestations servies aux conjoints collaborateurs sont modestes, notamment en matière de retraite : les cotisations vieillesses portant sur un revenu peu élevé, la pension de retraite qui en découle peut être insuffisante pour maintenir le niveau de vie du ménage. Un contrat d’assurance peut venir pallier les lacunes de ce statut, en venant compléter les prestations des régimes obligatoires. 
Nos conseillers Aésio peuvent vous aider dans le choix d’un contrat adapté.

Chiffres clés 

  • 45 000 : nombre de conjoints collaborateurs d’artisans et commerçants recensés au 31 décembre 2019
  • en 2019, 31 % des conjoints collaborateurs avaient 55 ans ou plus
  • Le statut de conjoint collaborateur couvre majoritairement les femmes : elles sont 71 % chez les artisans, 81 % chez les artisans et 85 % chez les professions libérales 

Vous souhaitez en savoir plus sur la protection du conjoint collaborateur ? Nos conseillers experts vous accompagnent pour vous protéger en cas d'arrêt de travail, d'invalidité ou pour tous autres besoins.

Sources : rapport de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 

 

(1) Voir l’étude d’impact de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4523_etude-impact.pdf

(2)  Rapport n°4568 de l’Assemblée nationale, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-soc/l15b4568-ti_rapport-fond.pdf 

Partager la page

D’autres articles dans le même thème